thème : répression
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jeudi 11 juin 2009 à 20h30

Ne me libérez pas, je m'en charge

Cinéma Utopia Saint-Ouen l'Aumône et Pontoise

La séance du JEUDI 11 JUIN à 20h30 à St-Ouen L'AUMÔNE sera suivi d’une rencontre avec Michel Vaujour et du producteur du film Bertrand Faivre

Fabienne GODET - documentaire France 2009 1h47mn - avec Michel Vaujour...

Du 10/06/09 au 16/06/09

NE ME LIBÉREZ PAS, JE M'EN CHARGE

Le titre du film, ce pourrait être la devise de Michel Vaujour, ex-ennemi public numéro 1… Mais ce sont d'autres mots qui résonneront longtemps lorsque vous sortirez de la salle : « J'ai appris l'humanité en rampant par terre. »

Après qu'un policier lui ait fiché une balle dans la tête lors d'un braquage qui a mal tourné, Michel Vaujour devient muet et hémiplégique. Voilà ce qu'il aura fallu au « Roi de la belle » avant de retrouver le droit chemin, celui de la vie et des choses simples, celui qui ne semblait pas fait pour lui. Michel a très tôt refusé toute autorité, il a rejeté ce chemin que lui avaient tracé ses parents, celui du petit fonctionnaire sans histoires. De petits larcins en braquages organisés, son choix de vie se confirme. Plusieurs fois incarcéré, il s'évade autant de fois (cinq au total), avec une inventivité qui ferait pâlir les plus grands scénaristes. Quand il n'essaie pas de prendre la poudre d'escampette devant le juge d'instruction grâce une fausse arme sculptée dans du savon, il organise son évasion spectaculaire en hélicoptère de la prison de la santé, le 26 mai 1986 (opération baptisée « La fille de l'air » dont a été tiré un film éponyme avec Béatrice Dalle).

Dans le film de Fabienne Godet, tout ceci reste cependant anecdotique, l'essentiel réside plutôt dans la sphère des évolutions intimes du personnage, dans sa propension à analyser ses vingt-sept ans de détention. D'une loquacité sans pareille, il établit le lien avec ses relations à l'autorité, la soumission, la rébellion et la fuite. Prisonnier de son corps, relus entre quatre murs délavés éternellement éclairés, il explorera son âme dans ses moindres recoins afin de de ne pas céder à la déchéance.

Dans les premiers temps, le jeune homme exalté qu'il était a vu l'incarcération comme une sorte de consécration, un moyen de faire ses classes, de se former et de faire de bonnes rencontres, comme d'autres font l'ENA ; un moyen privilégié de se forger convictions et compétence. Jusqu'au jour où l'institution pénitentiaire décide de le transférer en QHS (Quartier de Haute Sécurité), où il séjourne pendant dix-sept ans en isolement complet avec pour seuls interlocuteurs les matons.

Il raconte qu'au pied d'un des murs de ces couloirs mortifères, émergeaient quelques brins d'herbe et de rares fleurs que les gardiens s'empressaient de déraciner. Cernés qu'ils étaient de béton, ce petit bout d'expression de vie venue d'ailleurs semblait aux surveillants une aberration insupportable. Il fût donc un temps où les matons, derrière leurs uniformes, ne lui semblaient pas être des hommes. Jusqu'au jour où même les membres de sa propre famille, sa mère, sa sœur… deviendront pour lui des extra-terrestres. Quand elles lui parlent de leur dernier repas ou de leur quotidien, c'est comme évoquer la lumière du soleil aux occupants enchaînés de la caverne de Platon. Difficile de choisir la vie quand on n'a plus comme référence que la solitude, le silence et l'immobilité de toute chose. Cette vie prépare-t-elle à reprendre une place dans la société des hommes ?

Ces QHS, où sont enfermés les détenus présumés dangereux, n'ont visiblement pas l'effet escompté, loin d'apaiser leur esprit de rébellion ils nourrissent leur rage. Alors bien sûr ce gars-là n'est pas un saint, tant s'en faut, mais ce qu'il nous dit dépasse la seule introspection. A l'heure où l'on discute d'emprisonner les gamins dès l'âge de 12 ans, c'est une excellente occasion de méditer sur les conditions d'emprisonnement et les effets de la prison.

Source : http://www.cinemas-utopia.org/saintouen/index...

Lien : https://paris.demosphere.net/rv/9021