thème : international
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dimanche 7 juin 2009 à 17h

United Red Army

Cinéma Utopia Saint-Ouen l'Aumône et Pontoise

La séance du dimanche 7 juin à 17h sera précédée d’une présentation par Bich-Quân Tran, distributrice du film et spécialiste de l’extrême-gauche japonaise.

Koji Wakamatsu - Japon 2008 3h15mn VOSTF - avec Maki Sakai, Arata, Akie Namiki, Go Jbiki, Anri Ban, Maria Abe, Kenji Date, Yuki Fuji... Scénario de Koji Wakamatsu, Masayuki Kakegawa et Asaka Otomo. Musique magnifique de Jim O’Rourke, ex Sonic Youth.

Du 03/06/09 au 08/06/09

UNITED RED ARMY

C’est une histoire épique d’idéal, de passion, de pouvoir et de sang. Une histoire résolument japonaise, où les personnages ne renoncent jamais et que seule la mort peut arrêter. Une histoire où le déshonneur et la reddition n’ont pas leur place. Une histoire et un film dont la force évoque les fresques sanglantes et shakespeariennes d’un Kurosawa filmant les combats d’honneur des samouraïs. Mais dans United Red Army, les samouraïs ont été remplacés par des combattants encore plus déterminés : ceux qui, à la fin des années 60, ont refusé que leur pays abdique devant le vainqueur impérialiste américain, qui massacrait au Vietnam leurs frères d’Asie au nom de la démocratie, en utilisant leur pays comme base de transit ; des combattants étudiants qui ont lutté, à l’instar de leurs homologues français en 68, pour une université plus égalitaire et moins corrompue, des combattants qui, malgré leurs différences culturelles, se sentaient proches des combats de leurs frères marxistes de Palestine en lutte contre l’armée israélienne.

De la fin des années 60 au milieu des années 70, l’Armée Rouge Japonaise, groupuscule d’extrême-gauche, fit trembler le Japon et le monde puisque la branche internationale du groupe se livra à des détournements d’avion et à des attentats, notamment contre les intérêts israéliens. Comme le souligne le réalisateur, les mouvements de ce type ont été les plus radicaux et les plus efficaces dans les pays qui ont connu le fascisme, leurs membres sachant que ces démocraties factices, construites sur les ruines de l’après guerre, reposaient sur les tenants du fascisme. Avec au demeurant les mêmes ressorts : la plupart des membres de la Fraction Armée Rouge en Allemagne, des Brigades Rouges en Italie, de l’Armée Rouge Japonaise en sont passés par des combats pacifistes mais, face à une sauvage répression, ont décidé qu’il valait mieux en venir à la lutte armée. Une radicalisation nourrie dans les trois cas par la haine de la génération de leurs aînés, complices des fascismes et plus ou moins toujours aux rênes du pouvoir au milieu des années 60 et ce avec la complicité des « libérateurs » américains.

Mais l’originalité de Wakamatsu est d’avoir décrit l’Armée Rouge Japonaise non dans son exhaustivité chronologique, ce qui aurait été rébarbatif et peu éclairant mais, à l’image d’Eisenstein dans La Grève, dans la description de son échec final quand, mus par un réflexe très japonais d’autodestruction, les membres d’une des factions de l’Armée finirent par céder à la paranoïa, et s’entretuer lors de purges que Staline lui-même aurait admirées.

L’exercice est brillantissime en même temps que secouant, servi par une mise en scène où aucun plan n’est gratuit, la démonstration imparable, le travail autant de l’image (ah la fusion du sang et de la neige des montagnes japonaises !) que de la bande son (whaou la musique bruitiste de Jim O’Rourke !) impressionnants. Et Wakamatsu, orfèvre du cinéma (qui est passé pendant une bonne décennie par le cinéma érotique), sait mélanger les genres pour mieux enrichir le récit : exposé documentaire nourri d’archives, action admirablement menée (notamment dans l’assaut final contre le chalet où les survivants de l’Armée Rouge sont réfugiés) et huit clos étouffant lors des scènes de cérémonie d’autocritique sadique que doivent subir ceux qui sont soupçonnés de faiblesse ou de trahison. Au final et paradoxalement, United Red Army n’est pas une condamnation sans appel du sectarisme suicidaire des révolutionnaires d’extrême gauche mais au contraire un appel à ceux-ci pour réintroduire le désir et la fraternité dans leur lutte, retrouver ainsi les vrais ennemis et reposer les bases d’un vrai idéal révolutionnaire.

Source : http://www.cinemas-utopia.org/saintouen/index...

Lien : https://paris.demosphere.net/rv/8857