thème :
Réagir (0)EnvoyeriCalPartager

jeudi 27 novembre 2008 à 18h30

2 parties : 1 2

Le concept d’usager

université ouverte  du CIP-IdF

avec Mathieu Potte-Bonneville

jeudi 27 novembre 2008 à 18h30

La notion « d’usage » revient aujourd’hui de manière insistante dans le débat public, où elle marque le retour d’une identité politique que l’on croyait tombée en désuétude : les « usagers » ne sont plus seulement ceux qui protestent les jours de grève, mais ceux qui exigent d’avoir voix au chapitre face aux institutions médicales, ou qui transforment l’orientation même des technologies de l’information (on a pu parler, à propos du web, de « révolution par les usages »), ou qui s’affirment « usagers de drogues » pour souligner qu’il y a là la réalité d’un savoir et la liberté d’une pratique. Parallèlement, les usagers sont la cible de toutes les attentions du pouvoir : la thématique de la « participation » s’organise aujourd’hui largement autour de la sollicitation des usagers, visant la production sociale d’un consensus. Le problème est alors de dénouer cette ambiguïté : quand la position d’usager est-elle le simple relais des pratiques de gouvernement ? Et à quelles conditions, au contraire, peut-elle acquérir une portée critique ?

Mathieu Potte-Bonneville introduira la séance qui sera suivie d’une soupe.

"Leur voix n’était invoquée que pour briser les grèves, elle a pris désormais d’autres inflexions : au coeur des mouvements sociaux, les usagers développent une contre-expertise, revendiquent un droit de regard, font valoir les inventions de la pratique et de la jurisprudence, réconcilient radicalité et pragmatisme. Or, la question des usages est, en un autre sens, la nervure centrale du travail de Foucault. Rapprochons ces luttes et cette oeuvre : on verra se dessiner une nouvelle image de la pensée et de l’action politique."

Mathieu Potte-Bonneville, Politiques des usages Vacarme n° 29,

Source : http://www.cip-idf.org/article.php3?id_articl...


Le gouvernement des individus.
Université ouverte 2008-2009.

Pour cette troisième année de l’Université ouverte, la Coordination des intermittents et précaires propose à nouveau un temps dédié aux confrontations et à la réflexion sur ce qui nous arrive . Il s’agira de reprendre, autrement et avec d’autres, le fil suivi en 2007 lors d’une lecture du cours de Michel Foucault donné en 1977-78, Naissance de la biopolitique. Ce cours analyse l’émergence du néolibéralisme non pas comme une marchandisation généralisée mais comme une technique de gouvernement des sujets qui vise à faire de chacun un entrepreneur de soi et dessine la société comme un ensemble d’entreprises.

Nous avons choisi de renouer avec l’analyse foucaldienne du libéralisme car nombre de ses apports font écho à l’expérience à laquelle se confrontent les chômeurs et les précaires, les salariés, discontinus ou non, en formation ou en poste. Le management par l’entreprise et par ce que l’on continue d’appeler, faute de mieux, l’« État-providence », le suivi personnalisé des chômeurs et des allocataires, l’accompagnement vers l’emploi, la gestion des minima sociaux, sont autant de techniques d’individualisation qui interviennent directement dans la vie et les comportements d’usagers sommés de devenir autonomes (sortir de l’assistance). Ces techniques d’individualisation transforment radicalement la signification des dispositifs sociaux : les allocations-chômage, les aides sociales et les politiques d’insertion n’assurent pas des droits mais tendent à mettre en oeuvre des incitations (l’emploi !). De tels dispositifs matérialisent un continuum de peurs qui informe les vies : peur de déchoir au modèle de réussite et de consommation, angoisse du lendemain, insécurité éprouvée sous la menace d’être radié, de subir la visite domiciliaire d’un agent contrôleur de la CAF, de devoir prouver son employabilité, d’avoir à répondre à des interrogatoires sociaux ; les moyens les plus divers incitent et imposent la libre adoption de styles de vie normés. Une fois de plus, la réforme continue de ces institutions et rapports prétend s’accélérer : Une série de dispositifs sont en cours de refondation (patronale) : l ’Unedic digère l’ANPE et devient "France emploi" ou, plus glacial encore, " Pôle emploi", l’"offre raisonnable d’emploi" installe une nouvelle gare de triage tandis que l’instauration du RSA doit activer 3,5 millions de pauvres....

L’université ouverte 2008-2009, sera également consacrée à une série d’ateliers dédiés au thème de la culture, en partant de l’hypothèse que les politiques culturelles n’expriment pas seulement des choix économiques et des stratégies culturelles, comme nous l’avons vu pendant le conflit des intermittents, mais qu’elles exercent également des effets sur les subjectivités et les pratiques.

Ces politiques culturelles constituent, toujours selon cette hypothèse, un instrument de gouvernement des populations - les « publics » - et de gestion des territoires et de la ville. Séparées de la société (économie, social, travail, etc.), elles n’opéreraient plus alors que comme une plus-value réservée aux classes dominantes.

Nous reprendrons à cette occasion à notre compte une question formulée par Félix Guattari (in Culture : un concept réactionnaire ? (Micropolitiques, Les empêcheurs de penser en rond, 2008) : « Comment produire de nouveaux agencements de singularisation qui travaillent pour une sensibilité esthétique, pour le changement de la vie à un plan plus quotidien et, en même temps, pour les transformations sociales aux niveaux des grands ensembles économiques et sociaux ? »

L’analyse de Foucault peut permettre de saisir la généalogie et le sens de ces relations de pouvoir : comment sommes-nous passés d’un gouvernement des âmes exercé par le pouvoir pastoral de l’église chrétienne au gouvernement des hommes exercé par l’entremise des dispositifs de l’« État-providence » et de l’entreprise et leurs techniques d’individualisation ?

Il s’agit de proposer plusieurs pistes à la discussion publique, à partir de la lecture de textes de Foucault et de l’analyse de diverses expériences, dont les permanences d’accueil et de défense des droits qui se déroulent à la coordination des intermittents et précaires (CAP , Conséquences de l’application du protocole Unedic, et Précarité) et l’enquête collective en cours* sur les pratiques sociales, le travail, l’emploi et les droits sociaux dans un contexte de précarisation. Ces activités font elles-aussi apparaître la spécificité de relations de pouvoir qui s’exercent non seulement depuis le surplomb de la souveraineté (la loi), par le contrôle des corps (l’État pénitentiaire) et des rythmes (l’emploi), mais directement à même la trame de l’existence, des subjectivités.

Décrire le fonctionnement et la logique de ce gouvernement des conduites suppose d’interroger à la fois les modalités d’assujettissement et les usages que chômeurs, précaires et salariés font de ces dispositifs. Comment les « usagers » utilisent-ils les revenus et les droits ? Quels processus de fuite, de détournement et de résistance (les contre-conduites évoquées par Foucault) peuvent s’opérer dans une société structurée par l’individualisation ? Quel type de rapport à soi est susceptible de transformer la subjectivité ? Comment inverser ou détourner des relations de pouvoir qui visent à assujettir, qui imposent leurs « styles de vie » ?

* Recherche soutenue par le Picri

Ce cycle de rencontres se composera de séances plénières mensuelles au cours desquelles différents intervenants présenteront leurs activités et leurs recherches pour introduire à des échanges ainsi que d’ateliers ponctuels dévolus à un travail de groupe sur telle ou telle thématique.

Les séances de l’université ouverte ont lieu à 18h30, à la coordination des intermittents et précaires, 14 quai de la Charente, 75019, M° Corentin Cariou, ligne 7

Jeudi 9 octobre 2008 : Suppression du RMI, instauration du RSA, Nicolas Duvoux (sociologue)

Mercredi 29 octobre 2008 : Un gouvernement à la culture ?, Alain Brossat, Mathilde Priolet et Aline Caillet

Jeudi 27 novembre 2008 : Le concept d’usager , Mathieu Potte-Bonneville. On peut également prendre connaissance d’un dossier de la revue Vacarme : usagers, comme ils disent

Jeudi 18 décembre 2008 : Restitution d’ateliers sur les techniques de gouvernement des pauvres et des précaires , depuis des récits recueillis dans le cadre de la recherche collective en cours et une lecture de textes de Foucault dont « Omnes et singulatim » : vers une critique de la raison politique et des extraits de Sécurité, territoire, population (Gallimard, Seuil, Hautes Études, 2004)

Jeudi 22 janvier 2009 : S’apprécier : pourquoi et comment épouser la condition néo-libérale ?, Michel Feher

Mercredi 18 février 2009 : Souci de soi, souci des autres, Liane Mozère

Jeudi 19 mars 2009 (sous réserve) : Vies ordinaires, vies précaires, Guillaume Le Blanc

Jeudi 23 avril 2009 (sous réserve) : analyse d’un corpus de lettres envoyées à Martin Hirsch, Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté

Jeudi 21 mai 2009 : Qu’est ce qu’une enquête collective ?

Jeudi 25 juin 2009 : Séance de clôture, où en est-on ? Comment continuons-nous ?

L’actualité, des contributions de chercheurs et de collectifs, des conflits sociaux, conduiront à proposer d’autres rendez-vous que ceux indiqués ici. L’annonce des ateliers se fera au fur et à mesure de leur programmation. Le programme, indicatif, sera précisé ultérieurement sur l’ agenda. On y trouvera également des compte rendus de séances et un corpus de textes à la rubrique Université ouverte.

Pour soutenir la CIP, envoyez vos chèques (à l’ordre de AIP) à la CIP-IdF, 14-16, quai de la Charente, 75019 Paris. Sur demande une attestation peut vous être fournie.

Source : http://www.cip-idf.org/article.php3?id_articl...

Lien : https://paris.demosphere.net/rv/7029