mercredi 17 janvier 2018 à 19h30
Réunion reportée
https://paris.demosphere.net/rv/59324
Nous vous informons que notre réunion du 17/01 à 19h30 est reportée.
Lien : https://paris.demosphere.net/rv/59324
Source : message reçu le 16 janvier 15h
Rencontre avec Chantal Montellier.
« Debout les damnées du crayon !!! »
Chantal Montellier devrait être une artiste reconnue tant son travail depuis plus de 40 ans en bande dessinée est important. Mais finalement elle reste plutôt méconnue du grand public, ses albums anciens ne sont pas toujours disponibles et surtout son engagement militant très fort et une parole libre n'aide pas à la reconnaissance médiatique.
Chantal a démarré sa carrière au début des années 70. Après avoir obtenu le Diplôme National des Beaux-Arts section peinture à Saint-Etienne (première école des Beaux Arts à cette époque) et avoir fait un bref passage par l'Éducation Nationale, elle commence à publier des dessins politique dans la presse d'extrême gauche: Combat syndicaliste (organe de la CNT), L'humanité puis Politis, Le monde, Marianne… Elle est à ce titre la première femme dessinatrice de presse politique dans un domaine principalement réservé aux hommes (ses consœurs exerçant plutôt leur talent dans l'illustration). Le milieu de la presse est peu différent de ce qui se passe dans le monde du 9e Art et plus généralement dans cette société qui sort juste de Mai 68 et qui reste encore principalement dirigée par des hommes.
Elle aborde la bande dessinée à travers les publications de l'époque: Charlie Mensuel (1974), Métal Hurlant ou la revue trimestrielle Ah! Nana (9 numéros de 1976 à 1978) réalisée par des femmes pour un lectorat féminin. Elle participe à cette aventure éditoriale, expérimentale et avant-gardiste unique en France, dans le prolongement des luttes récentes pour la reconnaissance du droit des femmes. Sans tabous, avec un ton résolument offensif, le magazine aborde des sujets dont on ne parle pas dans la société giscardienne: la sexualité des femmes, les violences, l'inceste... mais fort heureusement Anastasie et ses grands ciseaux veille. Le titre est interdit pour pornographie (une pornographie qu'il n'a jamais contenu) dès le numéro 7, le numéro suivant qui traite d'homosexualité connaîtra le même sort et le numéro 9 sur l'inceste est immédiatement censuré ce qui provoque la mort du titre et la fin de l'aventure.
Son premier album est publié en 1978 aux Humanoïdes Associés sous le titre 1996 (dystopie orwelienne aujourd'hui en partie réalisée). Il préfigure déjà le style Montellier : une bande dessinée adulte, combattante qui dénonce les formes multiples d'un système basé sur l'avilissement, l'enlaidissement et l'écrasement du citoyen, de la femme, de l'artiste.
Dans ses bandes dessinées, Chantal Montellier s'attaque avec un militantisme sans concession aux bavures policières ( la série Andy Gang dès 1979 ), au terrorisme d'État (Le sang de la commune 1982 Ed Futuropolis ; Les damnés de Nanterre 2005 Ed Denoel Graphique), au viol (Odile et les crocodiles 1983 ed Les humanoïdes réédité chez Acte Sud/l'an 2 en 2008), à la désinformation orchestrée par nos dirigeant qui provoque des victimes innocentes (Tchernobyl, mon amour, 2006 Actes Sud).
En 2007, elle fonde avec une autrebédéaste, Jeanne Puchol, l'association Artémisia. Référence marquée, historique, à cette artiste italienne du XVIIe: Artémisia Gentileshi devenue icône féministe. C'est la première femme peintre reconnue, répertoriée par l'Histoire de l'Art, mais aussi une victime de la violence des hommes (violée à son adolescence, elle subira l'humiliation d'un procès).
Depuis 10 ans, l'association œuvre pour la visibilité du travail des femmes dans la bande dessinée par tous moyens.
Le prix Artémisia est remis chaque année en janvier, privilégiant les talents un peu plus singuliers, plus personnels que cette bande dessinée trop convenue, trop consensuelle et trop commerciale qui inonde le marché "Girly".
La prochaine lauréate recevra son prix le 12 janvier prochain dans la bibliothèque de la Fondation René Dumont (Agro-ParisTech-Musée du vivant).
Chantal Montellier a une vraie œuvre, sincère, puissante et militante, avec un immense talent graphique qui participe, depuis des décennies, à la lutte contre la connerie humaine et l'abrutissement des masses. A lire et relire sans modération.
Christophe
Groupe Gaston Couté (Le Monde Libertaire)
Source : message reçu le 11 janvier 16h