thème : international
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mardi 3 juin 2008 à 18h30

Soirée d’information sur
le Sommet des Peuples de Lima (13 au 16 mai 2008)
le Tribunal Permanent des Peuples

Le Collectif Amérique Latine a le plaisir de vous inviter à cette soirée.

Programme

  • Présentation du Sommet des Peuples - Rencontres de Lima du 13 au 16 mai 2008
  • Présentation de la sentence du Tribunal Permanent des Peuples (session Transnationales européennes en Amérique Latine
  • Echanges et réponses aux questions du public

Enlazando Alternativas 3 – LIMA 13 au 16 mai 2008

Déclaration du Sommet des Peuples

Nous, organisations sociales, politiques et populaires, de travailleurs et travailleuses, de migrants, communautés indigènes et paysannes, mouvement des femmes, des jeunes, et mouvement syndical d’Amérique Latine, des Caraïbes et d’Europe, réunis à Lima durant le Sommet des Peuples, Enlazando Alternativas III, déclarons :

La coopération et l’intégration de nos peuples passent d’abord par la construction d’un système dans lequel les droits économiques, politiques, sociaux, culturels et environnementaux du plus grand nombre soient une priorité et une raison d’être des politiques gouvernementales. C’est pour ces raisons que nous rejetons le projet d’Accord des Associations, proposé par l’Union Européenne et approuvé par plusieurs gouvernements latino-américains et caribéens, qui ne visent qu’à intensifier et perpétrer l’actuel système de domination qui a fait tant de mal à nos peuples.

La stratégie de l’Union Européenne, « Europe globale, celle de la concurrence dans le monde », suppose le perfectionnement des politiques de compétitivité et de croissance économique qui cherchent à gonfler le carnet de commandes de leurs transnationales et à approfondir les politiques néolibérales, incompatibles avec le discours sur le changement climatique, la réduction de la pauvreté et la cohésion sociale. Bien qu’on prétende protéger leur identité en incluant des notions de coopération et de dialogue politique, l'essence du projet est d’ouvrir les marchés des capitaux, des biens et des services, de protéger l’investissement étranger et de réduire la capacité de l’Etat à promouvoir le développement économique et social. Cela a des implications dans les deux régions.

Pour l’Amérique Latine et les Caraïbes cela reproduit le schéma des Traités de Libre Commerce avec les Etats Unis auxquels ont adhérés la plupart des pays de la région, et qui vont bien au-delà des politiques de l’O.M.C. que nous rejetons. Les ressources naturelles de ces pays sont exploitées sans discernement, des communautés entières sont déplacées, la biodiversité dévastée, les ressources hydriques épuisées,la main d’œuvre paupérisée, et les multinationales européennes ont une lourde part de responsabilité. Depuis des siècles l’Amérique Latine a été victime du saccage des multinationales et, maintenant, alors que des avancées démocratiques stimulent la recherche de chemins propres au développement dans différents pays, et de formes d’intégration au service des peuples, plusieurs gouvernements qui appliquent les recettes du libre commerce favorisent la fragmentation de la région, les contradictions entre ces différents pays et les affrontements nationaux. En Europe , l’une des grandes menaces pour la démocratie, la justice, la paix et l’équilibre écologique, est le Traité de Lisbonne, qui est ratifié par les élites sans consultation préalable de la population, et que nous rejetons comme nous l’avons déjà fait par le passé. Ce traité renforce l’Europe néolibérale, intensifie la militarisation, l’exclusion, les inégalités et la marchandisation, et il favorise le durcissement des politiques sécuritaires et répressives. Et en sont la preuve l’augmentation de la précarité, une attaque généralisée contre tous les droits sociaux, en particulier les conquêtes sociales. En même temps la construction de « l'Europe Forteresse » s’accélère, ce qui implique la fermeture des frontières, violant ainsi le droit d’asile et criminalisant les migrants et les mouvements sociaux, créant des murs virtuels ou réels, qui ne sont pas différents de ceux qui sont construits à la frontière au Nord de l’Amérique.

Les Accords d’Association que l’Union Européenne a signé avec le Mexique et le Chili ont aggravé les inégalités et montrent le chemin que suivront ceux qui signeront ces Accords en Amérique Centrale, dans la Communauté Andine des Nations et au sein du MERCOSUR dont on veut ressusciter les négociations. Pour les pays des Caraïbes, ces Accords, récemment signés, augmenteront la vulnérabilité et la dépendance de leur économie, de même qu’ils freineront la dynamique d’intégration régionale.

Au moment où à Lima les gouvernements parlent de cohésion sociale, de changement climatique et de réduction de la pauvreté, il convient de rappeler que la principale cause d'inégalités, de polarisation sociale, de dégradation environnementale et de discriminations, est la suprématie du marché sur les droits de la personne et l’octroi de toutes les garanties aux corporations qui privent les Etats de leur capacité à définir des projets nationaux de développement, et ceci avec la complicité des gouvernements. Les transnationales jouent un double jeu en s’appuyant sur les asymétries que les Accords d’Association ont tendance à renforcer. En conséquence, le discours sur la Coopération et le Dialogue Politique est l’appât qui fait mordre à l’hameçon des intérêts de ces corporations.

Face à la crise alimentaire qui affecte des dizaines de pays, nous dénonçons l’hypocrisie et les politiques des institutions multilatérales ( OMC,MI,BM,BID,BEI) qui veulent cacher ses véritables causes : orientation de la production de ces pays vers l’exportation, perte du rôle de l’Etat dans la régulation alimentaire et utilisation des aliments comme source de spéculation financière, tout ceci étant le résultat des politiques de « libre commerce ».De même, il est inadmissible que l’on préconise, pour sortir de la crise, plus de libéralisation et de déréglementation. La production massive d’agro combustibles aggrave les conditions de vie déjà difficiles de millions d’habitants. Nous rejetons une fois encore cette prétendue sortie de la crise énergétique et climatique.

Face à cette situation, nous, organisations formant partie de "Enlazando Alternativas", rappelons qu'une intégration différente est possible, basée sur la libre détermination des peuples, le respect de l’environnement, des droits humains et des processus démocratiques entrepris par les gouvernements qui s’éloignent du néolibéralisme et cherchent pour leurs peuples des relations égalitaires avec les autres pays du monde. Cela suppose, entre les peuples, le renforcement de la solidarité et de la coopération dans tous les domaines, la fin de toute forme de discrimination et le dépassement des pratiques de violation de la souveraineté des pays. Comme l’a montré la deuxième session du Tribunal Permanent des Peuples, nous demandons justice et réparation des torts, dommages et préjudices provoqués par les entreprises européennes, et la remise en question des relations avec ces entreprises, de façon à ce qu'elles assument les passifs sociaux et environnementaux qui leur incombent.

Nous saluons les nationalisations d’entreprises stratégiques pour le développement national et des ressources nationales, qui appartiennent aux peuples, et non aux transnationales, comme par exemple celle de l’entreprise bolivienne de télécommunications ETI/ENTEL. Nous lançons un appel aux gouvernements qui favoriseront des politiques progressistes pour qu'ils adhèrent au processus de transformation que nous encourageons. Nous condamnons les interventions provocatrices des USA et de l’Union Européenne contre la souveraineté des peuples. L’Union Européenne doit assumer sa dette historique envers les peuples d’Amérique Latine, en particulier envers les peuples d’origine. Nous attirons l’attention sur la situation dramatique de Haïti, résultat de décennies de spoliation, aggravée par l’actuelle domination militaire. Nous dénonçons aussi la politique de complaisance de l’Union Européenne avec le gouvernement colombien.

La seule issue pour les peuples latino-américains, caribéens et européens est de s’unir pour défendre leur bien-être et renforcer la résistance et la mobilisation contre les politiques néolibérales. Cette résistance doit se nourrir de l’apport des femmes, des peuples d’origine, des paysans et des autres forces sociales qui, de par leur présence au Sommet Social, ont donné un exemple de combativité et de créativité dans l’élaboration d’alternatives et de recherche de progrès fondé sur l’harmonie avec la nature, les droits humains et l’élimination de toute forme de discrimination.

Nous exigeons des gouvernements qu’ils tiennent véritablement compte des demandes des peuples pour créer un autre type de relations entre les régions, basées sur le dépassement du modèle marchand. Nous lançons un appel aux populations pour qu'elles ne se laissent pas encore abuser par des gouvernements autoritaires qui prétendent criminaliser les mouvements de protestation civile juste. Nous invitons les habitants d’Amérique Latine, des Caraïbes et d’Europe à se joindre aux forces de plus en plus nombreuses d’organisations qui recherchent un monde meilleur pour tous, pour être ainsi à la hauteur des défis auxquels l'humanité doit faire face aujourd'hui.

Nous invitons toutes les organisations sociales et populaires des deux Continents à préparer dès maintenant le prochain Sommet Social des Peuples, « Enlazando Alternativas IV », qui aura lieu en Espagne en 2010.

16 mai 2008

Publié dans le Courrier International – 23 mai 2008

PÉROU • Vingt multinationales face au Tribunal des peuples

La juridiction altermondialiste, créée en Italie en 1979, s’est installée à Lima en marge du 5e sommet Union européenne-Amérique latine. Elle a jugé notamment Bayer et Shell, accusées de violer les droits des Indiens.

Sur l’estrade qui sert habituellement aux discours officiels, des hommes et des femmes d’origine indienne ont préparé une offrande symbolique à la Terre – feuilles de coca, encens et prières en quechua. Le monde des Andes affiche ainsi ses codes, rituels et lois à quelques encablures à peine du centre de Lima, dans le cadre du Sommet des peuples organisé parallèlement au 5e sommet Union européenne-Amérique latine et Caraïbes [qui s’est tenu le 16 mai dans la capitale péruvienne]. Inaugurée le 14 mai à midi dans un amphithéâtre de l’Université nationale d’ingénierie [de Lima], la troisième édition du Sommet des peuples s’est ouverte devant un auditorium plein à craquer. Quelques heures plus tard, c’était au tour du Tribunal permanent des peuples de se réunir. Une juridiction à caractère non contraignant, devant laquelle devaient défiler des représentants indigènes, des organisations non gouvernementales, des mouvements sociaux et des partis de gauche afin de présenter leurs témoignages en tant que victimes affectées par des activités d’entreprises multinationales européennes. Dans le même esprit qu’une Commission pour la vérité, des témoins provenant de divers pays d’Amérique latine ont défilé pour raconter ce qu’ils ont vu, senti, souffert ou tu. Au total, vingt entreprises censées avoir violé les droits fondamentaux de communautés indiennes, de travailleurs et de populations vulnérables figuraient au banc des accusés. Selon Miguel Palacín, coordonnateur du Sommet des peuples, trois d’entre elles – présentes au Pérou – devront comparaître devant la justice. Parmi celles-ci figure l’entreprise d’exploitation minière Río Blanco Copper (anciennement Majaz), financée par des capitaux britanniques, qui exploite des mines dans les montagnes de la région de Piura [dans le nord du pays]. Les communautés paysannes l’accusent de polluer l’environnement et de mettre en œuvre des politiques répressives. L’entreprise agroalimentaire Camposol – qui appartient au groupe norvégien Dyer – sera également jugée pour avoir licencié arbitrairement des salariés organisés en syndicats. Le même sort attend le groupe agrochimique allemand Bayer, car on l’accuse d’avoir empoisonné quarante-quatre enfants de Cuzco – décédés après avoir ingéré un aliment contenant l’un de ses produits insecticides. “La plupart des multinationales sont protégées par les Etats. C’est pourquoi le Tribunal permanent des peuples est plutôt un tribunal d’éthique. Nous cherchons à attirer l’attention sur les violations des droits et des législations nationales et internationale”, explique Palacín.“Nous jugeons les entreprises pour remettre nos conclusions au gouvernement de leur pays d’origine. La suite logique serait le dépôt d’une plainte auprès d’un tribunal ordinaire.” Il explique également que toute la documentation légale et les témoignages recueillis par le Tribunal permanent des peuples fourniront les bases pour présenter ces dossiers devant la justice péruvienne.

Argentins, Boliviens et Équatoriens ont témoigné

Le tribunal a consacré sa séance inaugurale à l’affaire Río Blanco Copper. Devant un auditoire attentif, le président des communautés paysannes d’Ayabaca, Magdiel Carrión, accusé de terrorisme pour s’être opposé aux activités de cette entreprise minière, a pris la parole. “Nous sommes là pour dénoncer les violations que nous avons subies”, a-t-il annoncé. Avec la même intensité, des Argentins, des Boliviens et des Equatoriens ont témoigné afin de dénoncer les activités d’exploitation d’hydrocarbures de l’entreprise espagnole Repsol-YPF. Le groupe Shell, financé par des capitaux britanniques et néerlandais, est également mis en cause, tout comme l’entreprise finlandaise Botnia, accusée de détruire l’environnement par la construction d’une usine de pâte à papier sur la rive du fleuve Uruguay, côté uruguayen. Le Tribunal permanent des peuples a été créé en 1979, en Italie. C’est la deuxième fois qu’on y juge des entreprises à capitaux européens.

Milagros Salazar

La República

Source : http://www.franceameriquelatine.org/index.php...

Lien : https://paris.demosphere.net/rv/5921