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lundi 27 novembre 2017 à 20h30

Projection débat « La classe ouvrière va au paradis »

La Toile des Lecteurs en partenariat avec la Librairie Lettre et Merveilles de Pontoise

Rencontre /dédicace exceptionnelle le lundi 27 novembre à 20h30 à Utopia St-Ouen l'Aumône avec l'écrivain et activiste Serge Quadruppani, à l'occasion de la sortie de son polar Loups Solitaires ( Editions Metailié )

La classe ouvrière va au paradis

(La classe operaia va in paradiso)

Elio PETRI - Italie 1971 2h05mn VOSTF - avec Gian Maria Volonté, Mariangela Melato, Salvo Randone, Gino Pernice, Mietta Albertini... Scénario d'Elio Petri et Ugo Pirro. PALME D'OR, FESTIVAL DE CANNES 1972.

Du 27/11/17 au 27/11/17

« J'ai voulu faire un film sur un ouvrier moyen. Sur sa mentalité, sur ses faiblesses, sur ses déchirements. Et je l'ai réalisé avec un langage populaire ». Elio Petri

Le cinéma populaire selon Elio Petri, on en redemande (même si on sait que le moule est sans doute cassé) ! Quel film ! Truculent, explosif, complexe, grotesque, grandiose, burlesque, tragique ! Tout ça à la fois et sans jamais sombrer dans la facilité, dans le bien pensant, dans la complaisance. Le personnage de Lulù, incarné par l'époustouflant Gian Maria Volonté, porte sur ses larges épaules de prolo toute la richesse contradictoire du film. Ouvrier performant, la tête dans le guidon, abruti par les cadences autant que par les illusions de la société de consommation, écartelé entre deux familles, incapable de donner corps aux désirs bouillonnants qui le traversent, il va être soumis à une sorte de régime de la douche écossaise, brinquebalé par les événements, soumis à des influences antagonistes, lessivé, essoré… Et le spectateur suit le même parcours, jamais en repos, surpris sans cesse, interrogé, interloqué, bousculé en même temps qu'emporté par la puissance dramatique et narrative d'un vrai spectacle de cinéma.

Lulù Massa donc, stakhanoviste forcené, ouvrier modèle, aux pièces, dans une usine métallurgique. Il connaît son boulot comme personne, il maîtrise sa machine à la perfection, la manoœuvre à un rythme qui fait se pâmer les contremaîtres et leurs fiches de rendement. Cité en exemple à tout bout de champ par son patron, mal vu, voire détesté, par ses collègues, qui luttent contre les cadences infernales et réclament des améliorations quant aux conditions de sécurité au travail. Revendications légitimes que Lulù se fait fort de mépriser.

Lulù, c'est un bel homme, un peu hâbleur, qui parle fort et qui semble n'avoir peur de rien ni de personne. Divorcé, père d'un Arturo qui est resté vivre avec son ex-femme - laquelle s'est mise en ménage avec un de ses collègues d'usine - Lulù vit maintenant avec Lidia, une coiffeuse qui possède une perruque différente pour chaque jour de la semaine, par ailleurs mère d'un gamin qu'il traite avec une affection bourrue. Lulù, au début du film en tout cas, il aurait pu servir pour un spot de campagne de Sarkozy : l'exemple parfait du type qui travaille plus pour gagner plus, pour consommer plus, pour s'aliéner plus. Pour combler plus une compagne dont il est persuadé qu'elle ne pense qu'à son apparence, qu'à son confort matériel. Le bonheur ? Pas vraiment. Notre Lulù a des accès de doute, des bouffées d'angoisse (scènes magnifiques à l'hôpital psychiatrique, où il rend visite à un vieil ex-ouvrier qui n'a jamais été plus lucide que depuis qu'on l'a déclaré fou), il attendait autre chose de la vie, il ressent une frustration qui le ronge, qui lui gâche le caractère en même temps que le quotidien de son entourage… Frustration qu'il essaiera de vaincre, bon mâle latin, en séduisant puis en dépucelant sans gloire (et à l'étroit, dans sa Fiat 500 !), une petite ouvrière qui saura s'émanciper, de lui comme du reste.

Il faudra un accident du travail, qui lui coûtera un doigt et déclenchera une grève de solidarité, pour que le regard de Lulù sur sa place et son rôle dans l'entreprise change, assez radicalement. Il devient alors un meneur du combat syndicale, appelant à la grève illimitée…

Sur le monde de l'entreprise, sur la course à la rentabilité, sur la machine infernale du travail déshumanisé, sur le miroir aux alouettes de la consommation, sur la confiscation (par les cadences, par la publicité, par les divertissements standardisés…) de la possibilité de réflexion, sur la confusion quant aux modalités de résistance, La Classe ouvrière va au paradis (il faut attendre les dernières scènes du film pour avoir le fin mot de ce titre sardonique) est d'une modernité saisissante. Une raison de plus de ne pas le rater.

LA CLASSE OUVRIÈRE VA AU PARADIS

Lien : https://paris.demosphere.net/rv/57830
Source : http://www.cinemas-utopia.org/saintouen/index...