mardi 6 octobre 2015 à 20h30
Projection rencontre « Mediterranea »
https://paris.demosphere.net/rv/41769
La séance du mardi 6 octobre à 20h30 à Utopia Saint-Ouen l'Aumône sera suivie d'une rencontre proposée par le collectif « Cergy Pontoise en transition »
sur le thème brûlant des réfugiés et des difficultés de leur vie quotidienne.
En présence de réfugiées érythréennes hébergées provisoirement à Pontoise, de la CIMADE, avec Antoine Decourcelle, responsable asile de France et de l'association UNITED.
Avec le soutien du NPA et du Parti de Gauche.
Mediterranea
Film écrit et réalisé par Jonas CARPIGNANO - Italie 2015 1h47mn VOSTF
Chaque jour des migrants tentent de traverser la Méditerranée pour gagner l'Italie. Chaque jour beaucoup en meurent. Le risque est connu de tous, et si tant d'hommes, de femmes et d'enfants tentent leur « chance », c'est qu'il leur est impossible de rester dans leur pays. Chaque jour les médias nous « informent » sur ces drames de l'immigration. Des émotions que provoquent en nous ces informations, nous ne faisons souvent pas grand chose. Nous nous blindons. Des réalisateurs en font des films. Sans doute une façon pour eux de faire quelque chose justement de leurs émotions, de leurs réactions, de leurs réflexions. Une contribution qui donne un autre éclairage. C'est la force de la fiction : elle met des visages sur des faits qui sans ça resteraient divers, elle extrait de milliers de trajectoires apparemment semblables l'histoire unique d'une vie, elle nous rappelle, comme une évidence, le devoir de solidarité envers celles et ceux qui sont les nôtres, d'où qu'ils viennent. En nous déstabilisant, l'artiste nous remet en ordre de marche.
Ce n'est pas aux raisons du départ que Jonas Carpignano a décidé de s'intéresser. Il ne choisit pas non plus de nous faire vivre une de ces traversées apocalyptiques. Il se concentre sur ce qui arrive à ceux qui sont passés, le voyage étant rapidement évoqué, en quelques scènes courtes et efficaces.
Partis du Burkina Faso, Ayiva et son cousin Abas retrouvent en Calabre des membres de leur village et vont bénéficier de leur aide : pour trouver un logement, un travail, pour apprendre les codes de la vie du clandestin. Mais tout est compliqué quand on n'a pas les papiers qui attestent du droit à vivre sur tel ou tel bout de terre. Dans un premier temps, chacun fait avec ce qu'il a, et le logement n'est qu'une tente dressée sur un terrain vague au sein d'un campement illicite. Une installation plus que sommaire, une propreté toute relative et la compagnie des rats. Les petits boulots qu'on peut décrocher sont durs, la cueillette de fruits n'est pas réputée comme étant une bonne planque. Et si le patron est plutôt cool, s'il prend Ayiva en sympathie, cela n'en reste pas moins de l'esclavage moderne. Et puis l'argent gagné a vocation à aider la famille demeurée au pays. Reste donc le strict minimum, rien de plus. Heureusement qu'il y a les copains retrouvés, arrivés depuis un peu plus longtemps. Mais la précarité de leur situation n'est pas moindre, juste un squat au lieu des tentes. De leur côté les femmes paient cher, parfois même de l'intégrité de leur corps, le prix de la survie… mais tous gardent le sourire. Ont-ils le choix ? Le retour serait un terrible échec, il faut donc tenir. Tenir malgré le racisme car tous les Calabrais, dont la situation économique n'est pas plus brillante que celle de nombreux européens, notamment du sud, ne sont pas aussi accueillants que Mama Africa, une grand-mère qui prend soin de ces migants, leur offrant repas, tombola et surtout son sourire bienveillant.
La force du film tient à l'intelligence, à la précision du scénario et à la mise en scène attentive, tout en retenue, de Jonas Carpignano. Mais il doit beaucoup également à la qualité de l'interprétation des deux acteurs principaux, en particulier Koudous Seihon : nous sommes à chaque seconde avec Ayiva. Son visage mange l'écran. Il est tout sourire, gentillesse, optimisme et volonté mais on sent bien le découragement qui le gagne parfois… Qui ne se laisserait pas atteindre dans de pareilles conditions ?
Mediterranea brosse un tableau sans aucun doute parfaitement réaliste de la vie de ces migrants africains. Réaliste mais jamais misérabiliste, jamais enjolivé non plus. Mais ce qui nous marquera pour longtemps, c'est le portrait d'Ayiva, grand et beau personnage de cinéma.
Lien : https://paris.demosphere.net/rv/41769
Source : http://www.cinemas-utopia.org/saintouen/index...