thème : répression
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vendredi 29 juin 2012 à 9h30

2 parties : 1 2

Procès d'un des policiers impliqués dans la

mort de Lakhamy et Moushin à Villiers-le-bel

au tribunal correctionnel de Pontoise.

Infos à venir : http://atouteslesvictimes.samizdat.net

http://atouteslesvictimes.samizdat.net/?p=1043

Lien : https://paris.demosphere.net/rv/22026
Source : message reçu le 7 juin 08h
Source : commentaire ci-dessous (merci)


Procès du flic qui conduisait la voiture

responsable de la mort de Lakhamy et Moushin

Vendredi 29 juin 2012 au Tribunal de Pontoise s'ouvre le procès du flic qui conduisait la voiture RESPONSABLE de la mort de Lakhamy et Moushin "Paix à leurs âmes",c'était en 2007 à Villliers le Bel ...La Valeurs de leurs Vies c'est Nous qui la donnerons suivant le Nombre de Personnes qui Soutiendrons la Famille des victimes sur les sièges du tribunal...Pour ceux et Celles qui le Peuvent RDV à ne pas MANQUER, Motiver vous!..car PAS DE JUSTICE PAS DE PAIX!!!....

http://www.etatdexception.net/?p=1309

Lakhamy Samoura et Moushin Sehhouli sont ces deux jeunes qui ont perdu la vie suite à un accrochage avec la police, à Villiers-le-Bel, en 2007. Leur mort embrasa la ville. Quelques « révoltés » accusés d'avoir tiré sur des policiers à cette occasion ont pris entre 3 et 15 ans de prison lors de leur procès en première instance. Lors du second procès en assises, les frères Kamara ont vu leurs peines confirmées : 12 et 15 ans de prison.

Quant aux responsables de la mort de Lakhamy et Moushin, ils feront face à une justice plus clémente…

État policier : quand les bourreaux deviennent les victimes

Plus de quatre ans après la mort de Lakhamy et Moushin, percutés par une voiture de police à Villiers-le-Bel, le conducteur du véhicule devra répondre d'une accusation d' « homicide involontaire » devant le tribunal correctionnel de Pontoise. Un procès qui intervient au terme d'une série de non-lieu expéditifs, suivis de recours et - finalement - d'une mise en examen concédée comme un gage de bienveillance et d'équité. C'est en effet à quelques jours de l'ouverture du procès en appel des « tireurs présumés de Villiers-le-Bel » (le procès en première instance s'est tenu en octobre 2011) que ce renvoi en correctionnelle a été annoncé. Difficile de ne pas faire le lien entre les deux. De ne pas se dire qu'il s'agit d'un côté de délier les mains à la justice pour lui permettre de frapper fort ces « tireurs présumés » de l'autre. Le 19 avril 2012, on apprenait en outre qu'un des policiers présents à bord du véhicule de police était poursuivi pour « faux témoignage ».

La justice est sortie renforcée de l'exécution judiciaire des frères Kamara lors du procès des tireurs présumés : elle a démontré que son couperet peut s'abattre librement, sans autres motifs que les impératifs sécuritaires qu'elle cautionne et nourrit. Et cette démonstration a été acceptée par une grande partie de la population.

Á côté du procès destiné à souligner la puissance de la justice, celui du conducteur du véhicule de police a une fonction symbolique : il s'agit de faire croire que la justice est aveugle - à la race, à l'uniforme, à la fonction - et donc impartiale. Et si le conducteur écope finalement d'une condamnation de pure forme, cela ne sera pas dû à son statut, aux durcissements des revendications d'impunité du corps policier, au rôle essentiel que joue la justice dans la cohésion des différentes branches de l'État, mais aux « éléments du dossier » insuffisants ou au « doute raisonnable » d'un juge bienveillant.

Au moment du verdict, il faudra évidemment se souvenir des peines éliminatrices assénées aux frères Kamara en octobre 2011 : 15 et 12 ans. Mais il faudra également garder en tête les peines de principe dont ont « écopé » en février 2012 les policiers responsables de la mort d'Hakim Ajimi, étouffé par la BAC de Grasse, en plein centre-ville devant une dizaine de témoins[1]. Il faudra se souvenir du sourire triomphant du meurtrier de Youssef Khaïf lors de son acquittement au terme d'un « procès colonial »[2], de la relaxe du gendarme qui il y a quelques années abattait Joseph Guerdner de plusieurs balles dans le dos, de la mise à mort de Karim Boudouda au pied de son immeuble à Grenoble en 2009, de Wissam El Yamni lynché par la police à Clermont-Ferrand le 31 décembre 2011. Il faudra se souvenir des victimes salies par les procureurs et les juges, les syndicats policiers et les médias. Oui, il faudra ne rien oublier de tout cela pendant ce procès prétendument destiné à « apaiser les esprits », un procès « de paix et de réconciliation »[3]. Sa tenue marquera la clôture, légale et symbolique, de la « bataille de Villiers-le-Bel ». Et montrera à nouveau que toutes les vies ne se valent pas ; une inégalité qui se traduit en décès ou en années de prison pour certains, en sursis ou en avancement professionnel pour les autres.

Le procès du conducteur intervient par ailleurs à un moment-clé : à la revendication du statut de victime, que les policiers mettent en avant depuis 2005, est venue s'ajouter celle d'un permis de tuer, comme l'ont montré les manifestations de policiers soutenant leur collègue mis en examen pour homicide volontaire après la mise à mort d'Amine Bentounsi à Noisy-le-Sec le 21 avril 2012[4].

Lors des révoltes de Villiers-le-Bel, puis de leur répression judiciaire, la figure du policier-victime était l'enjeu central. C'est pourquoi on assista à une « saturation médiatique » autour des violences subies par la police et des tirs au plomb, quand il n'y avait là en réalité rien de très nouveau. Cette propagande médiatique, puis judiciaire lors des divers procès, a permis un renversement : les vraies victimes n'étaient plus Lakhamy et Moushin, mais bien les policiers blessés et « traumatisés ». En d'autres termes, le bourreau est devenu victime. C'est cette inversion qui fonde la revendication policière d'une « présomption de légitime défense », soit l'inscription dans le droit de l'impunité policière - de quoi faciliter aussi la tâche de la justice quand elle blanchit les auteurs de crimes policiers, en lui fournissant une arme judiciaire imparable. Et ce nouveau statut de victime accordé par les médias et la justice intervient alors même que le modèle d'action policière et de maintien de l'ordre (armement, unités de harcèlement dans les quartiers populaires) devient plus offensif.

Vérités

« À l'heure actuelle, on ne sait pas comment ça s'est passé. On n'a pas de témoignage. Mais il y a tellement d'ancienneté, d'anecdotes qui se passent, ils ont une telle habitude de violence, ils ont une telle habitude d'un comportement discriminatoire qu'on ne croit pas dans ce qu'ils disent, qu'on ne croit pas dans leur version[5]. »

Le procès s'ouvrira le 29 juin, la plupart de ses séances seront sans doute consacrées à l'examen détaillé des circonstances de la collision entre la moto sur laquelle circulaient Lakhamy et Moshin et la voiture de police, à la comparaison entre la déposition du conducteur et les conclusions de l'expertise. Avec cette question à trancher : le 25 novembre 2007, par sa conduite, ce policier s'est-il rendu coupable d'homicide involontaire ?

Mais on ne saurait cantonner la vérité à la détermination des circonstances précises de la mort de Lakhamy et Moshin. Car cette vérité est également à chercher dans la fréquence des parechocages policiers, dans le nombre de personnes qui meurent en tentant de fuir la police, dans l'occupation policière, dans les méthodes de chasse des unités de police déployées dans des territoires perçus comme fondamentalement hostiles, étrangers. Elle est dans ce que la sœur de l'un des « tireurs présumés » appelle « l'insécurité policière ». Une vérité qui n'émerge jamais dans les enceintes des tribunaux. Pourtant, la peur de la police qui pousse irrésistiblement à fuir, sa fonction de répression et de harcèlement, son histoire faite de violences et d'occupation/« reconquête » de territoires « perdus », sont déterminantes dans la mort de Lakhamy et Moshin, de Mohammed Ben Mâamar, de Yakou Sanogo, de Malek Saouchi.

Au fond, deux processus parallèles permettent de retracer la vérité sur une mort imputable à la police. Le premier est l'enchaînement des événements : Lakhamy et Moushin circulent à moto, une voiture de police - lancée à 60 km/h, en phase d'accélération - les percute, ils sont projetés et meurent. Les policiers quittent rapidement les lieux.

Le second processus est social et historique. Il se compose du harcèlement policier au quotidien (Lakhamy et Moshin avaient été contrôlés par la BAC au cours de la journée), de la mémoire de la police dans le quartier (des humiliations, des GAV injustifiées, des coups, des accusations d'outrage ou de violence) et de fragments d'histoire (des récits du 17 octobre, du racisme subi par les anciens, des crimes policiers connus dans le quartier et dans d'autres). Et c'est ce second processus, cette seconde force, qui est systématiquement écarté par les procureurs, les tribunaux et les médias, voire par les avocats de la défense[6].

C'est peut-être parce que cette seconde dimension est systématiquement mise à l'écart qu'une impression de « tout recommencer à zéro » se dégage à chaque nouvel élément s'inscrivant dans cette succession de crimes impunis. Dès qu'une famille et un quartier perdent un proche sous les coups, les balles ou le pare-choc d'une voiture de police, les mêmes éléments s'enchaînent. À chaque nouvel épisode, on demande aux familles de faire preuve d'humilité et de « patience » devant les mensonges institutionnels qui salissent la mémoire de leurs proches, devant des non-lieux ou des acquittements, devant des procès où le mépris de l'appareil judiciaire succède à celui de la police.

« Que vaut la vie de Youssef ? », demandaient les militants du MIB au moment du procès du meurtrier de Youssef Khaïf. Une question qui n'a cessé de se poser depuis, suscitant toujours la même réponse. Depuis une trentaine d'années, les procès d'auteurs de crimes policiers démontrent que s'en « tenir aux faits » ne suffit jamais à obtenir gain de cause devant la justice. De l'affaire Youssef Khaïf[7] à la mort d'Hakim Ajimi, l'histoire se répète : à chaque fois, tous les « faits » et « éléments » accusent lourdement et sans ambiguïté les policiers, mais ils sortent du tribunal acquittés ou avec des peines de prison avec sursis. Au fond, rester au plus près des faits et établir un dossier à charge ne comblera jamais le fossé qui existe entre des vies qui valent moins que d'autres et les représentants d'une institution dont le rôle central dans la mise au pas de certains territoires lui garantit le soutien sans faille de l'État.

C'est bien pour cela que la vérité que recherchent les nombreux « comités vérité justice » est aussi faite des lenteurs, des entraves, des contradictions de l'appareil judiciaire, de son refus de reconnaître l'évidence. Le traitement judiciaire d'un crime policier est une partie de la vérité : elle révèle ce que vaut la vie d'un Arabe, d'un Noir, d'un Gitan, mais aussi ce que vaut la liberté d'un policier. Elle révèle ce que la police peut, sans courir de risque, lui faire subir.

Collectif Angles Morts, le 25 mai 2012.

Source : message reçu sur la liste résistons ensemble le 27 juin 21h