mardi 3 mai 2011 à 20h30
projection "Collision" - débat avec Rokhaya Diallo, auteur de "Racisme : mode d'emploi"
https://paris.demosphere.net/rv/16676
Collision
La toile des lecteurs - Le rendez-vous mensuel cinematographico/littéraire proposé par l'excellente librairie pontoisienne Lettre et Merveilles et Utopia !
Le principe très simple : un ( e ) écrivain, romancier(ère), essayiste, auteur de BD nous fait partager un film de son choix.
Séance exceptionnelle le mardi 3 mai à 20h30 à Utopia Pontoise suivie d'une rencontre avec Rokhaya Diallo, auteur de « Racisme : mode d'emploi » ( Editions Larousse )
Collision
(crash) Paul HAGGIS - USA 2005 1h54mn VOSTF - avec Don Cheadle, Matt Dillon, Jennifer Esposito, William Fichtner, Ryan Phillippe, Sandra Bullock... Scénario écrit par Paul Haggis et Bobby Moresco.
Du 03/05/11 au 03/05/11
Paul Haggis, scénariste-adaptateur des quatre derniers films de Clint Eastwood, Mystic River, Million dollar baby, Memoires de nos pères et Lettres d'Iowa Jima - sacrées références ! - a eu envie d'écrire le scénario de Collision à partir de ses expériences personnelles, de ses peurs et de ses observations sur notre monde. Un jour, en sortant d'un vidéo club, il s'est fait voler sa voiture sous la menace d'une arme à feu. Rentré chez lui, il a changé toutes les serrures de sa maison et a commencé à s'interroger sur ses agresseurs. Depuis combien de temps étaient-ils amis, qu'aimaient-ils faire pour se distraire, se considéraient-ils comme des criminels ? À partir de ce questionnement purement scénaristique, Haggis a commencé à écrire une histoire en adoptant la perspective des voleurs...
Collision, c'est donc le portrait d'une dizaine de personnages qui ne se connaissent pas. En trente-six heures leurs destins vont se frôler, se croiser, se télescoper, révélant ce que chacun voulait cacher ou ne pas voir…
Il y a deux voleurs de voitures qui, entre deux braquages, discutent de la condition de l'afro-américain dans une société de blancs. Il y a un serrurier mexicain qui invente des contes de fée pour sa petite fille et qui subit sans broncher les insultes d'une riche cliente. Cette dernière, qui serre son sac contre elle quand elle croise des gens de couleurs, vient de se faire braquer et fulmine contre les blacks. Le comble, c'est qu'elle est l'épouse du District Attorney et que lui se présente comme le candidat des minorités. Et puis il y a le flic, jeune recrue, confronté à la rue et à son coéquipier dont il ne sait quoi penser mais avec qui il ne veut plus patrouiller. Ce qu'il ne sait pas, c'est que ce dernier passe des nuits blanches à cause de son père malade qu'il n'arrive pas à faire hospitaliser (mention spéciale à Matt Dillon qui incarne ce flic facho et au bord du gouffre). Il y a aussi les inspecteurs, équipiers et amants, dérangés en pleine nuit pour aller sur une scène de crime, mais qui auront un accident de voiture sur le chemin. Première collision, il y en aura d'autres.
On pense naturellement à Magnolia, autre film choral, peut-être un des meilleurs avec le Short cuts de Robert Altman. Si Collision n'en a pas la force romanesque, ni la mise en scène flamboyante, il n'en est pas moins formidablement réussi. S'il est moins spectaculaire c'est sans doute parce qu'il ancre son propos dans une réalité plus crue et plus commune. Il aborde deux sujets d'une obsédante actualité : la peur et un de ses corollaires, le racisme. Le sujet est universel, et quand il se situe dans une société étasunienne traumatisée par les attentats du 11 Septembre, il prend des allures quasi terrifiantes. Car c'est bien un miroir grossissant que nous tend l'auteur. Un miroir où l'on ose à peine se regarder, où nos préjugés sont exposés à la vue de tous, montrés en spectacle. Haggis aurait pu se faire père la morale, il n'en est rien, il nous laisse face à nos travers, à nos réflexes conditionnés d'occidentaux manipulés.
La construction du film est habile et Haggis réussit à installer une sensation de tension qui parcourt tout le film. Il dessine le portrait d'une société où la peur, le sectarisme et l'intolérance sont désormais les moteurs des rapports humains. Partant de là, les rencontres se transforment en de véritables collisions.
« Racisme mode d'emploi » de Rokhaya Diallo
« Je m'appelle Rokhaya Diallo, j'ai 32 ans, je suis née à Paris. Jusqu'ici rien de tragique. Jusqu'au jour où j'ai compris que j'étais noire… »
Le racisme raconté ici est celui qui ne dit pas son nom, qui s'insinue dans le quotidien par le biais d'innocentes plaisanteries (les fameuses blagues lâchées autour de la machine à café), qui apparaît au grand jour dans les stéréotypes véhiculés par les médias (le tout aussi fameux délinquant « d'origine maghrébine ») ou encore dans les discours des personnalités politiques (le non moins célèbre « Auvergnat »).
Truffée d'exemples et d'anecdotes, cette analyse, dont l'ambition est de lutter avec humour contre le racisme ordinaire, explore certaines théories philosophiques afin de les confronter à des questions essentielles :
Le racisme est-il tabou ? D'où vient-il ? À quoi et à qui sert-il ? La diversité est-elle « tendance » ? Sommes-nous tous racistes ?
Autant d'interrogations afin de dépoussiérer les idées reçues en proposant, sans craindre la polémique, une relecture originale d'une question plus que jamais d'actualité.
Militante féministe antiraciste et fondatrice de l'association Les Indivisibles, Rokhaya Diallo est productrice dans l'audiovisuel. Depuis 2009, elle est chroniqueuse pour la télévision (Canal Plus) et la radio (RTL).