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jeudi 3 février 2011 à 20h

2 parties : 1 2

Projection-débat autour du film de Jean-Pierre Thorn

93 la belle rebelle

Avec :

  • Jean-Pierre Dubois, président de la LDH,
  • Edgard Garcia, directeur de Zebrock,
  • Jean-Pierre Thorn, réalisateur du film.
  • Et en présence d'artistes du film

la programmation du film

Source : http://www.ldh-france.org/La-LDH-soutient-le-...


93, La belle rebelle

de Jean-Pierre THORN

Sortie nationale : Le 26 Janvier 2011

1h13 - France - 2009

Synopsis

Une épopée - du rock au slam en passant par le punk & le hip hop - incarnant un demi-siècle de résistance musicale flamboyante et se faisant porte-voix d'une jeunesse et de territoires en perte d'identité, sous les coups des mutations industrielles, des désillusions politiques et de l'agression constante des pouvoirs successifs les stigmatisant comme " voyous ", " sauvageons " ou " racailles " Ou comment, par strates successives, s'est fabriquée une contre-culture " underground " réinventant - par-delà le délitement des valeurs traditionnelles de la " banlieue rouge " - d'autres codes, d'autres mots, d'autres sons, d'autres façon de bouger, de colorer les espaces, d'écrire et de penser le monde… qui permettent à toute une jeunesse, se vivant comme exclue, de trouver ses repères et sa place dans la cité. La banlieue - à contrario des clichés - se révèle un espace incroyablement riche de métissages engendrant une créativité époustouflante.

Note d'intention

La Seine-Saint-Denis terre de bouillonnement musical

Le " 93 " a forgé son identité par la créativité de ses musiques qui, depuis les années 60, résistent à la stigmatisation constante des élites au pouvoir Au coeur du film la richesse humaine des rencontres avec chacun de ses protagonistes : souvent artistes d'exception, ayant révolutionné l'art de leur époque. J'ai été fasciné par la découverte de Dee Nasty (" King Zulu " de la funk et du hip hop), de Loran " Bérurier Noir " (îcone de la génération punk), de Marc Peronne (promoteur du folk jazz dans les années 70 et précurseur du slam) ou de Daniel Baudon (témoin vivant de l'irruption du rock en France dans les années 60 et de son encrage ouvrier. Comme j'ai adoré approfondir ma connaissance des rebelles d'aujourd'hui (dans une filiation à NTM) : je pense à la fusion étonnante du rap de Casey avec le rock radical de Serge Teyssot-Gay (ex-" Noir Désir " aujourd'hui " Zone Libre ")… Ou encore du slameur, D'de Kabal, accompagné par la rythmique puissante de Franck Vaillant, qui me rappelle le cri déchirant d'une Abbey Lincoln accompagnée de Max Roach dans le disque mythique " WE INSIST, FREEDOM NOW SUITE ! " Il est remarquable que des artistes, issus des ghettos français, soient sans le savoir dans une filiation aussi profonde avec le jazz des combats afro-américains des années 60 pour les droits civiques.

Fragments d'une histoire musicale et architecturale

Le film se propose d'inscrire le présent de chaque courant musical dans une histoire des classes populaires, depuis le début des années 60 jusqu'à nos jours. Capter comment chaque période musicale, chaque strate, s'est construite contre la précédente, puis - une génération après - recycle et dépasse les conflits dans une fusion géniale. Il s'agit de filmer l'histoire qui bruisse derrière les destins individuels. " Pour liquider un peuple on commence par lui retirer sa mémoire " (Milan Kundera dans " le livre du rire et de l'oubli "). Pour des jeunes, comprendre que leur histoire individuelle s'inscrit dans une histoire collective, c'est leur donner une distance face à l'hégémonie de l'Histoire " officielle ". C'est comprendre que - même en rupture scolaire ou au chômage - ils ont, eux aussi, une valeur ; qu'il leur faut cesser de croire que " la culture, ce n'est pas pour moi " ou qu'ils seront toujours citoyens de " seconde zone ". Donner à voir et entendre la richesse de la parole ouvrière, les mots et la culture des " sans grade ", revaloriser la culture des enfants de l'immigration (la culture Hip Hop en particulier), c'est permettre à une jeunesse (aujourd'hui exclue et stigmatisée) de se respecter et de prendre conscience de son potentiel.

Un territoire d'une beauté à couper le souffle

Derrière chacun des musiciens qui déroulent cette histoire, il y a celle des paysages et de l'évolution de ce territoire. J'aime l'immensité des espaces de la banlieue : cet enchevêtrement d'architectures en perpétuel mouvement : construit, rasé, remodelé, reconstruit… Et dans ce " no man's land " fascinant - intervalle de la ville en jachère - l'incroyable surgissement de la nature qui ne cesse de repousser et recouvrir les ruines des industries passées. J'aime les friches, la poésie des squats, la beauté des canaux et voies RER qui transpercent la ville et ouvrent des brèches dans l'imaginaire vers d'autres destins possibles. J'espère, par mes images, rendre compte de cette beauté sauvage, de ces vibrations de couleurs pastel, de ce murmure de la ville quand on la contemple depuis les tours. L'architecture de la banlieue, de ses terrains vagues, respire la vie des gens, l'histoire en renouvellement constant : véritable terrain d'aventure pour " Enfants des courants d'air " (film d'Edouard Luntz, Prix Jean Vigo 1960, chef-d'oeuvre occulté du cinéma français).

Retour aux sources…

Après Mai 68 j'ai travaillé 8 ans comme ouvrier O.S. (" établi " à l'ALSTHOM de Saint-Ouen commune ouvrière de la Seine St Denis). C'est là que j'ai réalisé mon second long-métrage " Le dos au mur " qui raconte la grande grève de l'ALSTHOM de 79 et constitue un hommage à mes potes d'ateliers dans cette usine, où j'ai eu le privilège de filmer de l'intérieur ce conflit et d'en faire une épopée. 30 ans après je reviens filmer avec, en quelque sorte, les enfants de ceux dont j'ai partagé la vie d'usine… Une histoire de fidélité ! Retrouver les mots de leurs pères, leurs gestes, leurs regards, cette rage à rejeter la dévalorisation engendrée par le système : la sélection par le fric, l'école, les origines, la classe sociale. Depuis je n'ai cessé de sillonner le territoire du " 93 ". J'y ai réalisé 2 films avec la culture Hip Hop, cette culture des enfants de l'immigration : " Faire Kifer les Anges " (Prix Michel Mitrani du FIPA 97), notamment à Dugny et Saint-Denis avec " Aktuel Force " compagnie mythique des débuts de la breakdance en France. Puis " On n'est pas des marques de vélo " (en 2003) qui eut pour héros un jeune breaker de légende, Bouda, condamné à une " double-peine " qui l'avait expulsé du territoire de son enfance : le " 9-3 " pour un pays qu'il ne connaissait pas : la Tunisie. Filmer les mots et les musiques des rebelles du " 93 " c'était pour moi un retour aux sources de mes premières amours. Un engagement qui dorénavant passe par la musique, le chant et la danse. Car à l'heure où les démagogues de tous poils dévaluent en permanence le poids des mots et des idées, pour un fils de prolo le seul endroit où l'on ne puisse pas lui voler sa langue et sa culture, c'est celui où les mots s'incarnent dans la danse. D'où cette invention d'un langage poétique et politique spécifique : celui du Slam et du Rap.

Le cinéaste tel un DJ

Comment capter cette énergie spécifique de la banlieue : cette rage ? Comment rompre avec le naturalisme qui englue nos regards? " Ne dites jamais : c'est naturel. Afin que rien ne passe pour immuable ! " (B.Brecht) La modernité du DJ (comme celle du " graffeur ") c'est l'art du collage : ce bricolage du pauvre. Je ne cesse de chercher - d'un film à l'autre - un cinéma épique : trouver une forme éclatée, hybride, une écriture faite de collages, cette fameuse " unité des contraires ": les contrepoints image/son, les cadrages en conflit avec les couleurs, les cadrages serrés avec l'immensité des plans d'ensemble, l'intimité des êtres en conflit avec l'universalité de la fable qui les traverse. Un cinéma musical qui pulse le spectateur. Trouver une forme épique pour révéler l'Histoire collective qui agit sous les destins individuels. Fabriquer de l'Épopée à partir de l'intime, là est mon paradoxe !

Le mouvement du film

Le film épouse le mouvement allant du rock pour fuir l'usine (dans les années 60) jusqu'au slam aujourd'hui pour recréer de l'activité et du lien social dans un monde d'où le travail s'en est allé. C'est cette mutation intense, que je cherche à cerner, derrière le déplacement des musiques et des personnages. Elle révèle un bégaiement de l'Histoire : les bidonvilles des années 60 (que l'on croyait éradiqué dans les années 70) reviennent en force le long des canaux et voies SNCF de la banlieue d'aujourd'hui… Seules ont changées les populations qui les peuplent: jadis immigrées de l'Europe du Sud ou d'Afrique, aujourd'hui travailleurs pauvres d'Europe de l'Est (de Bulgarie ou Roumanie), chassés par la crise économique dans leurs pays et qui, chaque matin, cherchent du travail le long de la " Nationale 3 " À travers le raccourci du film prendre conscience de l'incapacité chronique de tous les pouvoirs (de droite comme de gauche) à répondre aux utopies de la jeunesse autrement que par l'expulsion et la violence.

Distributeur : ADR distribution

Source : http://cinemasaintmichel.free.fr/horaires/fil...


FILM : "93 la belle" de Jean-Pierre Thorn en salle

Bonjour à tous,

Le film de Jean-Pierre Thorn sort en salle le mercredi 26 janvier.

Ci-dessous vous retrouverez toutes les dates où les projections seront suivies d'un débat avec le réalisateur.

On compte sur votre présence.

Faites passer!

NB : en pièce jointe un document accompagnant le film par la revue Fumingène.

Source : liste de diffusion TERRA, reçu le 20 janvier 15h

Lien : https://paris.demosphere.net/rv/15733